Au milieu des années 1980, les primes d’assurance collective représentaient environ 2 % de la masse salariale. Aujourd’hui, il n’est pas rare qu’elles dépassent 10 % et cela ne s’annonce guère mieux pour les prochaines années.
Alors que les coûts des soins de santé représentent un enjeu de plus en plus important, les entreprises de toutes tailles adoptent des stratégies en matière de mieux-être des employés. Or, il est difficile de justifier ces initiatives sans pouvoir en mesurer les retombées financières positives sur l’entreprise.
Pour ce faire, il est important de se baser sur des données probantes, qui se classent en trois types :
- données pharmacologiques ;
- données sur l’état général de santé des employés et ;
- données sur la productivité et le taux d’absence.
L’accès à ces données n’est certes pas toujours des plus faciles. Par exemple, pour avoir des renseignements sur l’état de santé des effectifs, il faudrait probablement retenir les services d’une clinique externe qui viendra sur place ou déploiera certains outils en ligne. Et c’est sans oublier qu’il faut avoir l’autorisation préalable des employés pour connaître ces informations. Mais il ne s’agit pas d’obstacles insurmontables.
En fait, le défi est surtout que, malgré l’existence de ces données, soit elles ne sont pas traitées soit, lorsqu’elles le sont, elles sont analysées « en silo », sans mise en corrélation.
Plusieurs recherches, dont une récente conduite par la Ivey Business School, ont souligné le lien étroit entre la santé et la productivité. Intégrer les données de productivité avec celles de la santé et la consommation pharmacologique peut alors aider les employeurs à développer une stratégie d’investissement dans leur capital humain.
N’oublions pas non plus que des fournisseurs de soins de santé et des consultants ont collaboré avec des experts afin de développer des outils de gestion intégrée. C’est d’ailleurs cette intégration des informations qui permet d’avoir une vision globale et de dessiner les tendances.
À titre d’illustration, on pourrait déterminer si les employés dont les réponses au questionnaire d’autoévaluation de la santé physique et mentale se trouvent dans le dernier quartile s’absentent vraiment davantage que la moyenne des effectifs. Ou encore quelles sont les probabilités d’invalidité de longue durée chez les personnes consommant des médicaments pour dépression.
Certaines règles s’imposent toutefois, notamment celle de préserver la confidentialité des informations. L’employeur ne doit pas avoir accès à l’identification particulière d’une affection ou de l’état de santé d’un ou plusieurs employés spécifiques.
Cependant, l’analyse de données globales peut servir de tableau de bord de la santé de l’organisation. Ainsi, on serait en mesure de connaître, de manière ponctuelle, l’état global de santé physique et psychologique de l’effectif par rapport à sa productivité ainsi que d’identifier les divergences de résultats entre différentes divisions.
Il serait également envisageable d’établir une mesure empirique des coûts globaux de la maladie. Celle-ci serait constituée de la somme des frais médicaux directs, des coûts directs et indirects des absences et des coûts du présentéisme qui se traduisent par une baisse de productivité, sans nécessairement qu’un employé soit absent.
Ce processus continuel, l’employeur devra bien l’encadrer. Il faudra multiplier les stratégies de communication afin de s’assurer que les employés se maintiennent en santé.
À cet effet, des programmes structurés existent déjà au sein des régimes collectifs, grâce aux outils technologiques (dont les médias sociaux, le téléphone intelligent et d’autres dispositifs portables, tel le Fitbit).
Étant donné la complexité de certaines mesures, on pourrait se demander si une telle approche ne s’applique qu’aux grandes organisations. Au contraire, il suffit d’y croire et de passer à l’action avec l’aide d’experts. Il faut simplement adapter les stratégies à sa manière. D’ailleurs, les petites entreprises ont souvent un avantage, car elles connaissent mieux leurs employés.
Les moyens traditionnels de contrôle des coûts de l’assurance collective n’ont toujours été qu’un baume sur la plaie : il faut changer le paradigme. Le seul moyen de réduire la hausse effrénée des coûts est d’affronter le problème à sa racine, soit de conscientiser et mobiliser les employés quant à leur santé, puis de cibler les malades chroniques et les symptômes de risque, et ce, par l’entremise d’une structure et d’outils ayant fait leurs preuves.